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Les escrocs de la réno (5/5) : la réno globale en open Bar-TH 164
Les escrocs de la réno (5/5) : la réno globale en open Bar-TH 164
Après quatre épisodes plutôt centrés sur MaPrimeRénov, voici notre dernier récit, cette fois dans le monde des CEE.
Pierre Pichère
Tout n’est pas terminé du côté des CEE. Ainsi, le petit monde des spécialistes de la rénovation énergétique s’émeut de fraudes massives à la fiche Bar-TH 164, consacrée à la rénovation globale d'une maison individuelle. Cette fiche d’opération standardisée a été revue en profondeur le 31 décembre 2021, des contrôles étant imposés. A tel point que les opérations découlant de cette fiche n’ont représenté qu’un peu plus de 3 % du volume de CEE générés l’an dernier. Mais des devis continuent à être signés en 2021, antidatés. Voici un exemple des pubs qui défilent sur les groupes WhatsApp autour de la rénovation énergétique auxquels nous avons eu accès.
Deltas de performance
Outre l’antidatation, le jeu consiste à augmenter au maximum le delta entre le niveau d’origine de la maison et la performance après travaux, pour valoriser au mieux l’opération. Alors que certains acteurs transparents remettent des rapports d’une vingtaine de pages, les spécialistes de la fraude à la Bar-TH 164 misent plutôt sur 200 pages par chantier, parmi lesquelles il est bien difficile de repérer les fraudes. Elles sont pourtant réelles. En jouant sur l’altitude (La Rochelle située à près de 3000 m !), en utilisant dans un département tempéré la température de référence du Territoire de Belfort (le plus froid de France), en augmentant systématiquement d’au moins 20 % les surfaces, les valorisations en CEE atteignent des sommets. « On voit des chantiers passer entre 40 000 et 120 000 € », s’indigne un observateur attentif. Certaines anomalies en deviennent cocasses : 100 m² de toiture pour 200 m² d’emprise au sol, ou encore 400 m² habitables pour une porte extérieure et deux fenêtres… Ces opérations semblent transiter majoritairement par deux délégataires, et profiter au même obligé, l’un des trois grands énergéticiens français. Les connaisseurs du système que nous avons interrogés semblent penser que cette multinationale n’a pas conscience du sujet, qui passe sous ses écrans radars.
Les sommes sont pourtant conséquentes, probablement en centaines de millions d’euros. Alerté par plusieurs acteurs du monde des CEE, l’Etat semble enfin décidé à réagir. Un projet d’arrêté prévoit de stopper à juillet 2023 le dépôt de dossiers appuyés sur le dispositif en vigueur en 2021. Une date qui paraît encore bien tardive, et qui laisserait libre cours aux fraudes à cette fiche pour encore six longs mois.
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